Emmanuel Mounier ne manquera pas le Festival d’Angoulême, qui ouvre ses portes ce jeudi. Ce Polytechnicien a fondé Unique Heritage Media, qui détient « Picsou Magazine », mais aussi les journaux de Disney Magazines, Fleurus Presse et Quelle Histoire, ainsi que le dernier né des mensuels scientifiques, « Epsiloon ».
A 75 ans, Picsou s’est converti au bitcoin et a développé une conscience écolo… Le grigou de la bande dessinée célèbre les 50 ans du magazine qui porte son nom, et qui s’est détourné des gadgets en plastique au profit des cadeaux en papier. Un anniversaire inscrit au programme du Festival de de la bande dessinée d’Angoulême, qui ouvre ses portes jeudi. Mais cela ne représente qu’une particule dans la masse de projets d’ Emmanuel Mounier .
Fondateur d’Unique Heritage Media, le polytechnicien de 48 ans détient les journaux de Disney Magazines, Fleurus Presse et Quelle Histoire … et le dernier né des mensuels scientifiques, « Epsiloon ».
Ainsi à son agenda figurent, pêle-mêle, le lancement d’une nouvelle formule du « Journal de Mickey », la traduction en quatre langues des podcasts Mythes et Légendes et, bien sûr, la pérennisation d’« Epsiloon » qui, moins d’un an après son lancement, affichait récemment 40.000 abonnés et plus de 20.000 exemplaires vendus en kiosque chaque mois.
Pétiller les neurones
Si Emmanuel Mounier a mis de sa poche 1 million d’euros pour lancer cette revue (née de journalistes dissidents de « Sciences & Vie »), il souligne que « c’est l’un des meilleurs démarrages de la plateforme de financement Ulule, avec 1 million d’euros décroché via 24.000 préabonnements ». Et l’ingénieur, dont le credo est de « faire pétiller les neurones des lecteurs », d’évoquer avec gourmandise les sujets du mensuel : trous noirs, théorie des cordes…
En moins de dix ans, le père de deux garçons a bâti un petit empire médiatique employant 120 collaborateurs et pesant près de 70 millions d’euros de chiffre d’affaires, sachant qu’il vise « entre 150 et 200 millions d’ici à cinq ans ». Pourtant, rien ne prédestinait à l’entrepreneuriat ce fils unique d’une bibliothécaire et d’un professeur de Comptabilité… si ce n’est que son père a éveillé en lui, « dès l’âge de six ans, une fascination pour les intérêts capitalisés ».
Paribas, Pechiney, Dassault
Né dans la Creuse, l’amateur de voile assure qu’il a toujours peu goûté qu’on lui dicte sa conduite. Il fut donc peu disposé à intégrer une école d’application à l’issue de l’X et a remboursé à l’État ses frais de scolarité. Suivra un parcours dans les fusions-acquisitions chez Paribas, puis dans l’industrie chez Pechiney, avant qu’il ne soit chassé par Dassault Systèmes et enfin par Safran. Alors qu’Emmanuel Mounier y est promis au comité de direction, la santé de son fils cadet, sur liste d’attente pour une greffe du foie, change l’ordre de ses priorités : il « prend sa liberté ».
N’envisageant pas de « mettre son énergie en pause », il endosse les habits d’entrepreneur, en rachetant les éditions Quelle Histoire en 2014 et Fleurus Presse l’année suivante, puis Disney Hachette Presse en 2019 (devenu Disney Magazines). Résultat, Unique Heritage Media possède à ce jour une quarantaine de titres jeunesse, pour les 3 à 15 ans, depuis « Abricot » jusqu’au « Monde des ados », auxquels s’ajoute « Epsiloon », seule publication qui ne cible pas les jeunes lecteurs.
Pas de quoi toutefois étancher la volonté de croissance de celui qui entend devenir un leader européen de l’« édu-tainment ». « Vincent Bolloré veut croquer Lagardère et pourrait désinvestir dans des maisons d’édition jeunesse. Si tel est le cas, nous serons sur les rangs », glisse-t-il.
Plus physicien que matheux
« Emmanuel est davantage physicien que matheux : il est ancré dans la vie réelle », jauge Romain Lavault, associé gérant du fonds Partech. Et ce camarade de promotion à l’X, dont est aussi issue la nouvelle patronne d’Orange, Chrystel Heydemann, de préciser qu’« il concrétise ses idées en business ».
Pour preuve, Emmanuel Mounier a racheté l’an dernier 4 roues sous 1 parapluie, qui propose aux entreprises des escapades et rallyes en 2CV. A la tête de 80 « deuches », il planche sur un prototype de moteur à hydrogène afin de verdir sa flotte.
Portrait réalisé par Julie Le Bolzer, Les Échos, 16 mars 2022.